Auteur : Craig Thompson
nb de pages : 670
Série : one-shot
Catégorie : BD
Résumé personnel
Dodola est vendue par ses parents à un scribe alors qu'elle n'a que neuf
ans. Il lui apprend à lire et à écrire à partir des manuscrits du Coran
et de la Bible qu'il recopie. Il se fait tuer quelques temps après et
Dodola se retrouve vendue comme esclave. C'est là qu'elle rencontre Cham
tout bébé, qu'elle rebaptise Zam, et qu'elle s'enfuit avec lui vers le
désert. Ils vivent neuf ans ensemble puis neuf ans séparés. Lui la désire depuis l'enfance, mais elle le considère comme son enfant. Dodola n'est jamais libre : c'est une esclave, une femme, un objet. Même
si elle réussit toujours à s'en sortir grâce à son corps, elle ne
parvient pas à trouver le repos et ce même quand elle tombera enceinte.
De son côté Zam ne supporte pas son corps qui veut devenir un homme. Il
va aller jusqu'à le brider.
Mon avis
Entrer dans Habibi, c’est pénétrer dans un autre univers où la
narration suit le principe du Coran : on peut piocher plusieurs
chapitres pour les lire dans l'ordre que l'on souhaite, pour peu que
l'on connaisse la signification des lettres arabes. Quand ils sont séparés de force par le destin, chaque personnage vit sa vie dans le complexe de sa sexualité. L'esclavage sexuel pourrait être l'expression qui résumerait bien l'intrigue mais occulterait tout une partie plus joyeuse.
Le monde dans lequel évoluent les personnages est onirique. Le désert
ressemble à une mer de sable, au village on retrouve les déchets de nos
contemporains dans des égouts et on apprend plus tard que la ville,
dans laquelle le palais du sultan a été construit, est une cité très
moderne. Les éléments se mettent en place petit à petit et prennent des
proportions de plus en plus importantes. On passe d'un simple égout à un
lac d'ordures au village par exemple.
En toile de fond, se
dessine un plaidoyer contre l'ordurerie de la société (oui je néologise
moi aussi). On peut y voir une simple référence écologique dans un monde
qui devient de plus en plus technologique et où la nature devient un
simple dépotoir et une esclave. Mais en creusant un peu, ce monde et ce
désert devenu dépotoir c’est aussi la métaphore de l'histoire de Dodola
et Zam : leurs rêves d'enfant, leur cocon familial est brisé. Ils vivent
dans le monde des adultes mais sont livrés à eux-mêmes une fois
ensemble. Une autre image serait celle de la nature comme spectacle de
la condition de la femme et de la place de la sexualité.
La structure de cette BD est un peu plus complexe que celles que l'on
lit d'habitude mais s'y habitue facilement. On commence dans le désert, on finit par une image du
désert mais la narration est rythmée par des flashbacks et des
changements de narrateur. Le fil conducteur est le problème de la
sexualité. Un thème fort quand on voit que la totalité de l'intrigue
baigne dans les sourates du Coran.
Parlons un peu de la patte de l'auteur. Les dessins sont magnifiquement
bien exécutés mais ne
dessert pas l'intrigue, et vice versa. Ce graphisme nous marque d'emblée et permet de
partir ailleurs instantanément. Néanmoins, les détails sont tellement
nombreux
et les formes tellement stylisés qu'il faut parfois s'éloigner pour
pouvoir comprendre ce qui se passe sur les pages. C'est assez embêtant
dans une BD, mais c’est aussi un moyen ralentir sa lecture... Craig
Thompson en profite pour glisser des symboles comme ceux des archanges,
ceux de la féminité et du masculin, etc.
Petit point noir qui m'empêche de lui mettre la note maximale : le dernier chapitre. J'ai eu l'impression qu'il avait été bâclé. Après avoir été transportée dans les Contes des Mille et une nuits par
une main de maître, alors que la violence gratuite y régnait, la tension
retombe d'un coup. On est dans l'attendu, dans le manque de souffle alors que ce chapitre parle de respiration commune justement.
Lien vers l'article sur mon blog - N° 1 dans le challenge ABC 2012
Ma notation
Troublant ! je ne sais pas trop qu'en penser. Je crois que je jetterai un coup d'oeil au passage, mais je doute de lire ce livre-bd.
RépondreSupprimerTrès belle présentation.
Biz
Je ne suis pas une fan de Bd, mais de temps j'avoue que ça fait du bien. Celle-ci me tente bien du coup ...
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